Deux jours après avoir découvert le Bromo, nous quittons Malang pour Banyuwangi à l’extrème Est de Java pour notre deuxième volcan actif l’Ijen et son lac de cratère le plus acide du monde.
Je vous vois venir espérant une histoire de réglement de compte de trafiquants où la taupe de la police finirait dissoute dans l’acide du lac. C’est vrai que c’était tentant mais j’aurais plutôt vu une vengeance féminine sur fond d’adultère… où la femme trompée, emmène le mari ne se doutant de rien en vacances en Indonésie pour voir les volcans… à vous d’imaginer la suite, dans tous les cas il ne reste à la fin du mari, que quelques boutons de chemise en plastique flottants sur un lac turquoise.
Réveil à minuit pour un départ la demi-heure qui suit. Laurence et les garçons malgré l’heure plus que matinale sont contents car cette fois le véhicule est confortable et la montée au pied du volcan ne dure qu’une heure. Nous sommes à 1600 m et la température est relativement clémente quand nous attaquons la montée de l’Ijen. 3,5 kms de marche pour 700 m de dénivelés, le chemin de terre battue est facile malgré la pente, il n’a pas plu ces dernières heures et l’adhérence est bonne. Des dizaines de pousse-pousses charette multicolores sont alignés en bas de la pente



- Taxi, Ferrari, Lamborguini éructent les anciens mineurs reconvertis en chauffeurs de taxi!. Ils ne sont pas moins de trois par carriole pour la montée, deux devant qui tractent et un derrière qui pousse… c’est qu’un chinois bien nourri ça pèse ! En effet seuls des jeunes chinois bien peu courageux font appels aux taxis pour 1 million de roupies la montée. Calés dans une posture bien inconfortable ils trouvent le loisir de « smartphoner » durant tout le trajet ne se souciant guère des malheureux qui tout en sueur les montent 600m plus haut. Je comprends ces indonésiens qui veulent se faire un peu d’argent pour nourrir leur famille mais j’ai un peu honte de ces jeunes caricatures de touristes, méprisants envers ceux qui les tractent..
Mais bon c’est ainsi, et je ne devrais pas avoir à juger, mais quand même !
Nous trouvons un bon rythme et décidons de monter le dénivelé d’une traite à la lueur de nos frontales. Vers le haut une odeur d’œuf pourri nous prend au nez au détour d’un virage, et dans la nuit sombre se dessine en nuances de noirs un cratère large, où dans un amas de blocs on peut suivre la prudente descente vers le fond des mineurs éclairés des torches des touristes qui sont venus « voir les flammes bleues ». Nous nous joignons à ce chapelet de faisseaux lumineux pour commencer notre lente descente. À mi-chemin l’odeur est trop forte irritant yeux et poumons, et il faut mettre le masque à gaz que nous avons emporté. Au bout d’une quarantaine de minutes nous sommes au plus profond du cratère, attirés à quelques mètres de là par les lueurs bleutées et dansantes, de ce qui s’avère être la combustion du souffre.


Toutes lumières éteintes c’est tout simplement magique, les flammèches ondulantes d’un bleu métallique intense, forment à partir d’une sorte de cascade une rivière, qui en fait n’en est pas une, mais l’illusion que nous offre la nature est parfaite et bluffante. Nous pourrions rester à les observer des heures durant, mais deux phénomènes uniques en ce lieu nous en empêchent. Le premier: les touristes qui nous précèdent et ceux qui suivent font pressions pour la photo souvenir, on ne les blâme pas nous avons fait pareil, le deuxième: les fumées sulfureuses qui à quelques mètres jaillissent de la paroi de souffre, le Solfatare, menacent le groupe au moindre coup de vent très fréquent. Nous nous éloignons un peu pour nous retrouver juste au bord du lac. Nous tentons non sans appréhension de mettre la main ou plutôt les doigts dans cette eau au PH 0,2 en faisant le lac le plus acide du monde. L’acidité n’aura pas le temps de nous ronger les chairs et les os car à peine plongé, le bout des doigts picote et nous l’enlevons rapidement de peur de finir manchot ! Mais quelle incroyable ambiance, empreinte de la crainte, que ce bord de lac en pleine nuit dans le cratère de l’Ijen encore actif. L’an dernier en janvier un phénomène d’éruption explosive de type phréato-magmatique s’est produit sous le lac faisant remonter à sa surface des bulles de gaz volcanique, concentré d’acide sulfurique, chlorhydrique, et fluorhydrique (bulles pouvant atteindre un diamètre de 10m). La dangerosité des émanations a vu les autorités locales fermer le site et les environs pour 8 mois, générant une énorme perte pour les populations locales qui vivent du souffre mais surtout de ce tourisme volcanique.



Un petit coup de vent nous enfume et nous brule les yeux (j’exagère un peu, nous pique fortement les yeux ), nous profitons du mouvement pour remonter dans les premiers, ce qui nous permet d’assister au lever du jour sur le lac. De gris bleuté, il passe aux lueurs du jour à un bleu turquoise comme sorti d’un tube de couleur!
La vue en haut du cratère est spectaculaire et permet de mieux comprendre la géologie du site avec son solfatare (gisement de souffre), les éffondrements, les strates des couches magmatiques figées et la fissure de laquelle s’écoule l’eau acide du lac en une rivière (la Banyupahit) qui ira se jeter 40 kms plus loin en mer de Java. Nous n’échappons pas aux traditionnelles photos qui fixerons à jamais cette matinée encore incroyable.




Les garçons ont quand à eux pu profiter d’un cours de chimie en conditions réelles où les 36 millions de m3 d’acide ont une autre portée que quelques ml dans un tube à essai ! Ils ont pu aussi manipuler du souffre enflammé chose inimaginable en cours au collège.
Nous terminons notre détour à Java, riches de nouvelles connaissances de ces deux expériences volcaniques uniques.
Cap sur Bali…
Encore sur une autre planète … je vous envie ! Bonne fin d’anneau bout de votre Monde. Bisous
Pas d’anneau mais d’année.. pas damnée héhé
Salut Isabelle, effectivement nous ne sommes pas vraiment les damnés de la terre… et si on peut en partager quelques instants avec nos amis cela participe aussi à notre bonheur. On vous embrasse
Merci pour votre blog, pour les textes et les photos magnifiques. Juliette et Marin, nos enfants, se sont pris de passion pour votre aventure. Nous vous souhaitons une bonne année de « baroudeurs ». En Bretagne, il neige aujourd’hui. Laurence a une sacrée belle plume…
les Picotinos
Virginie, Bruno, Juliette et Marin
Bonjour à vous 4,
Je me demande ce que serait ce voyage s’il n’était pas partagé! C’est incroyable tout ce que nous vivons. J’avoue qu’à mi-parcours j’ai envie que ça dure toujours…
Vous n’imaginez pas à quel point nous avons chaud. Un nouvel épisode d’El-Niño s’est installé en 2023 sur le sud de l’océan Pacifique, après trois années d’un autre phénomène La Niña, et le vivre est vraiment une autre aventure…
C’est Luc qui écrit les articles depuis quelques temps, alors il faut lui rendre « son beau plumage »! Et oui, il sait tout faire…
On vous souhaite une année lumineuse et multiple (à vous les producteurs d’estampes…)
Laurence pour les 4B depuis Vanuatu, un autre nom qui fait rêver!