Semaine 16 – Loin du monde et de ses tumultes, loin des flux incessants d’une même information répétée à l’infinie, et alors que le Hamas lance des assauts sans précédent contre Israël et que les civils sont massacrés des deux cotés, nous entamons une partie de notre voyage que nous attendons depuis longtemps, le Népal sacré et ses immensités himalayennes. Une nouvelle occasion de nous couper du monde et de méditer sur l’absurdité de celui ci.
Nous arrivons au début de la haute saison, dans les sous-pentes du toit du monde. Les pluies devraient êtres finies depuis plusieurs semaines , mais le dérèglement climatique frappe aussi ici et les pluies d’orages sont quotidiennes, la brume et les nuages montent sur les sommets dès le début de matinée.
À Katmandou nous subissons des pluies torrentielles qui rendent le voyage vers Pokhara, comment dire: chaotique et un peu effrayant. 14heures de bus au lieu de 7 heures annoncées, des glissements de terrain, deux accidents et d’énormes trous dans la chaussée qui font que nous avançons à la moyenne vertigineuse de 13km/heure ! Le sujet des routes est ici récurent depuis des décennies, et il n’est pas étonnant que les routes népalaises soient parmi les plus dangereuses au monde.


Fourbus nous rejoignons Pokhara, au pied de la chaîne des Annapurnas. Pokhara est la deuxième plus grande ville du pays, qui nous séduira pour son calme comparativement à Katmandou si bruyante et polluée. Nous avons l’impression de reprendre notre souffle après la folie de l’Inde et de Katmandou. La ville est spécifiquement tournée vers le tourisme sportif et il y règne cette quiétude typique des villes de montagne. Nombres restaurants, guesthouses et agences de trek structurent l’économie de la région, mais depuis la Covid, ils n’ont malheureusement retrouvé que 40% de fréquentation (c’est peut être et très certainement ce qui rend la ville si calme et agréable à vivre du moins de notre point de vue). Pokhara sera notre base de départ pour l’aventure que nous recherchons dans les Annapurnas.
Nous débutons un trek de 10 jours avec deux buts remarquables à atteindre:
- Au troisième jour, la montée à l’aube sur le Poon Hill à 3210mètres donnant un point de vue incroyable sur la chaîne du massif des Annapurnas et la chaîne du Dhaulagiri culminant à 8167 m !
- Au 7ème jour, rejoindre l’ABC Annapurna Base Camp à 4130 mètres, que nous découvrirons après une longue montée de deux jours. Nuit au camp de base et réveil incroyable par temps dégagé avec une vue époustouflante sur les 13 sommets de la chaîne où l’Annapurna I culmine à 8091m.


le Poon Hill – 3193 mètres



Le trek du Camp de Base de l’Annapurna, aussi appelé Sanctuaire des Annapurnas, est l’un des treks les plus rêvé au monde. Il vous met littéralement face à face avec les 8091m de l’Annapurna I, ce qui pour un trek moyennement difficile est incroyable !
Nous empruntons l’itinéraire suivant : Hile (1430m), Ulleri (1960m), Ghorepani (2860m) (point de départ vers le Poon Hill à 4h30 du matin), Tadapani (2630m), Chomrong (2170m), Himalaya (2920m), Camps de Base de l’Annapurna (4310m), Bamboo (2316m), Jhinu Danda (1780m), Ghandruk (19640m). À chacune de ces étapes nous logeons dans des guesthouses tenues par les ethnies locales Gurung toujours très accueillantes. Vous retrouverez facilement sur une carte notre périple et si vous avez envie de venir n’hésitez surtout pas un seul instant ! Et pour ceux qui y sont déjà venus on vous remets une couche de souvenirs !



Le fascinant massif de l’Annapurna comprend le dixième plus haut sommet du monde, l’ Annapurna I (8091 m), l’un des 8000 les plus difficile au monde et très souvent fatal pour les alpinistes, même chevronnés (un sur trois y laisserait la vie soit le taux de mortalité le plus élevé parmi les sommets de huit mille). Nous n’y ferrons bien sur pas dl’alpinisme, mais simplement de la randonnée (si l’on puisse dire !) et c’est déjà génial . Mamie rassure-toi tes petits-fils ni ta fille ne sont en danger. Ce massif est aussi celui du Machhapuchhre (the Fish tail) montagne sacrée inviolée qui culmine à 6993 m que nous aurons en point de mire chaque matin, c’est aussi l’une des plus belle montagne du monde que les Népalais vénèrent.



Luc a fait ce choix de l’itinéraire qui conduit au camp de base de l’Annapurna pour que les garçons puissent faire leur premier 4000 mètres et surtout expérimenter un trek long. L’autre célèbre itinéraire du massif, le tour des Annapurnas, demande 21 jours de marche au total, ce qui était trop long pour une première. De plus plusieurs parties de ce circuit (entre Bhulbhule et Chame et entre Jomson et Nayapul) se font souvent en voiture, ce qui rend l’expérience moins attrayante. Nous privilégions un itinéraire sans aucun accès par la route. Seulement des marcheurs, des guides, des porteurs, des animaux et parfois un hélicoptère qui porte secours à un trekkeur en difficulté. Nous apprenons par notre guide, qu’il aurait été possible de faire Chame à Jomson en 10 jours de marche en prévoyant un jour de jeep au départ et un jour de jeep au retour, mais étant donné l’état des routes, notre choix d’ABC était le bon.
C’est bien sur, la première fois que nous venons marcher au Népal, mais sans doute pas la dernière, le choix de cet itinéraire plutôt populaire est parfait pour un premier trek dans l’Himalaya, annoncé accessible à ceux pouvant marcher 5 à 6 heures par jour, il est classé moyennement difficile. Il s’avèrera assez fréquenté sur les sommets mais très tranquille et agréable sur la majorité du parcours.



L’altitude s’annonce supportable, 4130 mètres après 6 jours d’acclimatation ne sont pas un problème pour la plupart des gens de bonne constitution. Une montée assez lente le dernier jour et une bonne hydratation nous permettra d’éviter tout désagrément. Les garçons feront même un foot avec les guides et les porteurs au base camp à 4130 mètres, c’est vous dire combien l’altitude est supportable sur ce trek, ils s’étonneront quand même d’être un peu essoufflés !
Nous aurions pu nous aventurer seuls, en achetant le permis de randonnée aux postes de police sur le trajet et en travaillant sérieusement la question en amont, mais étant novices dans le pays, nous préférons nous adresser à une agence locale: Happy Trek Nepal (que l’on vous conseille fortement ) https://www.happytreksnepal.com. D’autant qu’une loi datant d’avril dernier encourage vivement à prendre l’attache d’un guide pour randonner, les assurances ne fonctionnant peut être pas en cas de problème sans guide…Nous serons super bien accueillis par Udaya « Mr Happy » dès la descente du bus à Pokkara le 4 octobre jusqu’à notre départ le 19 octobre pour le parc national du Chitwan (une prochaine aventure) . Nous logeons chez lui dans les chambres d’hôtes qu’il a aménagé avec goût et sommes au petit soin de toute la famille. Dès le lendemain nous faisons la rencontre de nos deux porteurs Dipak, et le très jeune Samir et bien sur de notre guide Ram (une perle:calme, professionnel, attentionné, tous les qualificatifs lui vont à merveille) ils feront tous les trois avec Tomé et Séraphin une sacrée équipe dans la marche et dans toutes sortes de jeux le soir (foot, dés, cartes, cairn, bras de fer et autres…)



Et nous voilà partis le 6 octobre au matin pour 10 jours inoubliables …
Au rythme des marches quotidiennes, pas après pas ou plutôt marche après marche car il s’agit en fait d’un constant up & down où chaque jour des dizaines de millier de marches nous attendent sur les chemins ancestraux himalayens … nous passons d’une vallée à l’autre entre 2000 et 3000m, par de denses et somptueuses forêts subtropicales couvertes de bambous, de rhododendrons arborescents, de fougères, de palmes et plantes toutes plus belles les unes que les autres, tout cela nous donnant l’illusion de traverser les forêts enchantées du Seigneur des anneaux … (paraît-il que Tolken était venu ici s’inspirer: rien d’étonnant!)



Histoire d’eau !
Partout des torrents, certains justes ruisselants d’autres furieux grondant en bruits assourdissants, habitants jusqu’à nos nuits dans certaines guesthouses trop proches. Et des cascades, toutes sortes de cascades, celles éclaboussantes sur des murs de mousses et de fougères, celles dégoulinantes le long de parois rocheuses telles des cataractes, celles sautant de vertigineux précipices et encore d’autres d’une puissance inouïe ayant façonné la roche en goulets de plusieurs dizaines de mètres de haut… À chaque fois nous invitant à immortaliser l’instant, mais cet instant ne peut se fixer, il se ressent, se vit, s’écoute, se contemple…
Avec tant d’eau, il y a aussi les bébêtes qui vont avec et qu’on ne voit pas (ou peu) en l’occurrence les serpents et celle qu’on ne voit pas mais qu’on sent, je veux dire par là les sangsues! À l’affût au sol, elles vous attendent patientes et si par chance (pour elles) vous passez à portée de tortillement, elles se faufilent dans votre pantalon et sournoisement se mettent à goulûment à vous pomper le sang ! Heureusement elles ne portent aucune maladie et nous sommes bons pour une petite saignée qui finalement peut être nous fait du bien (Séraphin et Luc auront droit à chacun une dizaine de ponctions).
Dans chaque village, des guesshouses proposent des chambres à 2 ou 3 et nous accueillent le soir dans la salle commune façon refuge où nous prenons le diner vers 18H30 et jouons joyeusement aux cartes et aux dés avant le coucher vers 20h voir 20h 30 pour les couches tard !
Nous faisons quelques rencontres avec des marcheurs comme nous et partageons le quotidien avec nos porteurs et notre guide.
Séraphin parle avec tous les étrangers qu’il rencontre sur le chemin, je crois que ça lui plait vraiment de marcher, de raconter qui il est, ce qu’il fait ici et qu’il voyage pendant un an en faisant l’école « online » avec son frère.



La marche est régulière, les yeux rivés sur nos pas et sur ces montagnes sacrées si impressionnantes, pas à pas sur les dalles de pierre empilées en un escalier infini menant jusqu’aux toits du monde. Nous tentons quelques calculs, du nombre de marches empruntées, avec une moyenne de 6 marches par mètre de dénivelés…..très vite nous n’y pensons plus tant le calcul est vertigineux.
Chaque matin, c’est un jeu de cache-cache avec les nuages qui montent très rapidement dans la matinée, alors il faut se lever à 5h pour assister aux sublimes lever du soleil sur le Machhapuchhre et le South Annapurna.



10 jours de déconnection totale, sans internet ou très peu, simplement pour prendre quelques infos du monde qui s’avèreront être terribles entre l’attentat d’Arras notre ville et les attaques du Hamas et la riposte israélienne. Si loin si haut nous prenons de la distance sur la manière de ressentir l’état du monde, c’est une sensation autre que ce que nous sommes habitués à vivre au regard de tels évènements, et nous en profitons. Nous nous connectons à un autre monde, dans une immersion totale, plus vrai plus proche de ce que nous sommes réellement, un monde fait d’autres vivants domestiques ou sauvages, d’une nature puissante où l’humilité s’impose, un monde d’hommes et femmes en harmonie avec leur environnement où le sacré prend un tout autre sens hors des dogmes de nos monothéismes politisés.



Chaque jour nous apprenons un peu plus à regarder, écouter sentir ici une plante ou un animal: buffles , sangsues, abeilles sauvages qui font leurs nids dans les falaises, scarabées, corbeaux sacrés, petits chevaux robustes qui arpentent les chemins et transportent tous les produits venus de la vallée, les rizières, le millet, le fruit du Goba, le Tamarillo, la figue du Népal, les fougères, les mousses… un univers formant un tout. Le bémol, car il y a un bémol malheureusement c’est le plastique que l’on trouve ça et là (bouteilles, semelles, emballages en tout genre) charité par les torrents et les pluies de mousson et que l’on retrouve accumulé plus bas en dépotoirs où jouent les enfants et paissent les animaux. Certes cela n’atteint pas le niveau de l’Inde mais c’est un réel désastre jusque dans les zones les plus sauvages de l’Himalaya.
En arrivant sur les sommets entre le Machhapuchhre Base Camps et l’ABC, il n’y a plus aucun arbre, plus aucune marche non plus, parfois un lac de montagne et toujours un magnifique torrent.


Les Annapurnas forment une crête d’environ 48 km de long entre les gorges des rivières Kali et Marsyandi au nord de Pokhara. Le massif comprend quatre sommets principaux, l’Annapurna I (8 091 mètres) et l’Annapurna II (7 937 mètres)- situés respectivement aux extrémités Ouest et Est de la chaîne; l’Annapurna III (7 555 mètres) et IV (7 525 mètres) plus centraux et le Machhapuchhre.
Annapurna I est le 10ème plus haut sommet du monde. Il est devenu célèbre, quand une une expédition française dirigée par Maurice Herzog a atteint son sommet le 3 juin 1950., et à ainsi ouvert la voie aux grands treks et sommets du monde.







Un rêve réalisé
Un bel effort sportif tout de même. Pas de jour de repos, car nous voulions rentrer le 15 octobre à Pokhara, le dernier vaccin de Tomé étant programmé le 16 (tout c’est très bien passé et c’est maintenant une histoire passée)
Une marche parfaitement exécutée dans un bon timing avec des marches, beaucoup de marches, trop de marches pour Luc qui y laissera son dos et aura un lunbago au Jour 4. Il restera se reposer à Chomrong et ne verra l’ABC qu’à travers nos yeux.

Jour 9




Une marche qui provoque des émotions intenses: de l’euphorie, de l’envie de grimper toutes les montagnes du monde et en premier l’Everest pour Séraphin, parfois un peu de découragement pour Tomé quand la fatigue se fait sentir, mais la fierté d’avoir grimpé.
Et puis la profonde satisfaction d’avoir été au bout de soi-même, d’avoir pris encore plus conscience de son corps (demandez à nos mollets ce qu’ils en pensent!) par ce bel itinéraire, et cette découverte incroyable de montagnes tellement grandes, tellement imposantes.
Une expérience qui vous change quelque part et marque votre vie



L’aventure se termine, nous reprenons le chemin de la vallée, de Pokhara. Il nous faudra deux trois jours pour « atterrir » ou « redescendre » de cette magnifique expérience de marche dans l’Himalaya. Les parents se feront masser (je conseille la découverte de l’Ayurvédique à toutes celles et ceux qui ne connaissent pas et s’intéressent aux médecines alternatives). Les cours du CNED reprendront, fini pour Tomé et Séraphin les vacances d’automne! Séraphin profitera de Pokhara et d’une belle matinée pour réaliser son rêve: faire son premier vol en parapente !

merci pour cette évasion dans notre mercredi de grisaille! vous avez bien fait de partir! Bises
J’adore vous lire. Merci pour tous ces partages. Expérience incroyable. Bisous d’Arras où la grisaille pré Toussaint nous masue le ciel.
Plaisir de partager avec vous. Bises depuis Katmandou où les pluies sont bien terminées.
Coucou les 4b
Super expérience !!!encore du rêve pour nous !!bravo pour les marcheurs et nous espérons que Luc va mieux !! Des gros bisous de nous deux
Luc va mieux! et nous vous souhaitons une très belle marche à la Réunion!
Merci pour ce moment de communion avec vous la bas et nous ici dans la morosité ambiante. Continue à nous faire voyager Laurence … nous départ samedi pour les Tenerife puis la Palma pour leur douceur de vivre.
Continuez à nous faire profiter de votre. Elle épopée
Bises de Camblain
C’est une écriture à deux voix, celle de Luc et la mienne.
On essaie de partager ce que l’on ressent et vit dans certaines de nos aventures, et c’est très chouette de le faire à deux!
Bon repos dans les îles, faites le plein. Bises depuis Bangkok
Y être, c’est bien meilleur, toutefois en vous lisant, on avance presque avec vous, tellement vous décrivez si bien les choses, les chemins, vos sentiments
Un grand merci pour vos partages
Votre expérience partagée est passionnante. Plaisir que ce récit qui nous rappelle l’essentiel. Elans vers le sens de notre présence au monde… Merci!!!
Merci Gilles, mon premier titre était: Marcher dans l’Himalaya, l’essentiel.
Bises chez vous
Toujours aussi agréable de vous lire et de vous suivre. Quelle belle expérience !